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Allaitement ou biberon : pourquoi ce clivage ?

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Durant sa grossesse, une femme se verra forcément confrontée à la question de l’alimentation de son futur bébé. Il s’agit effectivement d’un sujet qui semble passionner l’entourage, qui aura forcément son mot à dire sur le choix des futurs parents. Que ce soit le biberon ou l’allaitement, rien n’est jamais validé à 100% et les jeunes parents se voient donc pour la plupart obligés de justifier leur choix, qui pourtant leur appartient totalement. Comment se fait-il que la question de l’allaitement ou du biberon suscite autant de débats ?

Comment les femmes nourrissent-elles leurs enfants ?

En France, l’allaitement n’est pas vraiment considéré comme la norme, particulièrement lorsqu’il est long. En effet, selon une étude publiée par Le Monde en 2015, 69,7 % des mères font le choix de donner le sein à leur enfant dès la naissance. Si cette décision peut alors sembler majoritaire, elles sont en réalité très nombreuses à arrêter rapidement après le début. Ainsi, dès le quatrième mois de l’enfant, elles ne sont plus que 18,3% à allaiter exclusivement leur bébé, et seulement 2,9% à donner uniquement du lait maternel à sa première année de vie. Il y en a tout de même 5,3% qui allaitent tout en donnant d’autres aliments à l’enfant à un an.

Ces chiffres sont très en marge des recommandations données par l’OMS qui préconise un allaitement exclusif de l’enfant jusqu’à ses six mois au moins, puis un allaitement partiel (combiné avec des aliments solides) jusqu’à ses deux ans. Ce constat est donc relativement étonnant, mais s’explique en réalité par de nombreux facteurs, notamment socio-économique.

Allaiter exclusivement son enfant devient en effet très difficile pour une jeune mère au moment de reprendre le travail. Si beaucoup de femmes mettent un terme avant cela à leur allaitement, d’autres doivent y renoncer lorsqu’elles doivent reprendre leur activité professionnelle. Le monde du travail n’est en effet absolument pas adapté à un allaitement long.

Le regard des autres joue également un grand rôle dans ces faibles chiffres d’allaitement en France. Pour beaucoup, donner le sein à son enfant est considéré une sorte d’asservissement qui est très mal vu depuis les premières révolutions féministes. D’ailleurs, le biberon a longtemps été perçu comme un symbole d’émancipation féminine. La « nudité » que représente l’allaitement pose également problème pour beaucoup. La poitrine de la femme est encore extrêmement sexualisée en France, alors que son rôle premier est nourricier.

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Le mythe de la « mère parfaite »

Si les femmes ont une telle pression au sujet de la façon dont elles alimentent leur enfant, c’est principalement à cause de la pression qu’elles s’imposent pour être les meilleures. Depuis toujours, les femmes sont considérées dans notre société comme les principales responsables de l’éducation des enfants. Seulement, depuis quelques années, elles sont également de plus en plus nombreuses à s’investir tout autant dans leur vie professionnelle que personnelle, ce qui laisse moins de place aux enfants. Progressivement s’est installée une « compétition » entre les femmes afin de prouver que toutes pouvaient assurer sur tous les fronts.

Dans ces conditions, les femmes qui allaitent peuvent donner la sensation de ne pas « vouloir évoluer » en se consacrant corps et âme à leur enfant pour les nourrir elles-mêmes. Toutefois, cette pratique peut également s’inscrire dans une nouvelle « mode » qui consiste à respecter au maximum l’environnement en réduisant ses déchets. L’allaitement peut donc être une façon simple et astucieuse de faire des économies et surtout de consommer moins. Néanmoins, cette nouvelle vague peut être vue d’un mauvais œil par ceux qui ne sont pas prêts à tous ces changements et qui se sentent alors dévalorisés de ne pas agir de la sorte.

Parallèlement à cela, les jeunes mères qui nourrissent leurs enfants au biberon peuvent être mal vues par celles qui font le choix de l’allaitement. Elles peuvent alors passer pour des mères qui ne donnent pas tout ce qu’elles ont pour la bonne santé de leur bébé, ce qui est bien évidemment totalement faux.

Le manque de tolérance est le principal problème dans cette « guerre » entre celles qui allaitent et les autres qui donnent le biberon. Si les femmes avaient moins de pression sur les épaules à cause de leur statut de mère, elles seraient très certainement beaucoup plus respectueuses les unes avec les autres.