Devenir mère n’est pas anodin et bouleverse complètement la vie des personnes concernées. Il faut dire qu’il s’agit d’un grand saut dans l’inconnu qui peut être aussi beau qu’effrayant. En outre, bien qu’on entende souvent parler de la grossesse, il est difficile de trouver des informations sérieuses sur la suite et sur les jours qui suivent la naissance de bébé. Pourtant, si toutes les femmes vivent ce moment complètement différemment en fonction de leur vécu et de leur caractère, certaines peuvent avoir la sensation de vivre une longue période d’errance, partagées entre toutes sortes de sentiments contradictoires. Un terme permet de décrire cette période si spéciale : la matrescence.
Qu’est-ce que la matrescence ?
La matrescence est souvent décrite comme étant l’adolescence des mères. Il s’agit d’une période d’errance qui ressemble finalement beaucoup à celle que les jeunes peuvent traverser au moment de l’adolescence. L’adolescence est considérée comme un moment difficile durant lequel les jeunes gravitent entre deux statuts qui ne sont plus très bien définis. Ils ont d’un côté encore un pied dans l’enfance et le deuxième dans le monde des adultes. Une bascule souvent difficile à gérer qui donne lieu à une explosion de sentiments contradictoires qui peuvent se manifester parfois de manière violente.
La matrescence n’est pas vraiment différente de l’adolescence dans le sens où elle représente également une période d’entre-deux. Les jeunes femmes concernées n’ont pas vraiment la sensation d’être devenues des mères alors qu’elles doivent pourtant assumer ce rôle qui est bien réel. On constate également dans les deux cas des changements physiques qui peuvent être très difficiles à accepter. Si la « crise d’adolescence » est bien connue de tous, celle des jeunes mères est totalement passée sous silence.
Le terme de matrescence est d’ailleurs extrêmement récent : il est apparu dans les années 1970 grâce à l’anthropologue américaine Dana Raphaël qui souhaitait mettre un nom sur ce phénomène de mutation afin de mettre fin au tabou qui l’entoure.
Apprendre à être mère avant de le devenir
Durant la grossesse, tout le monde s’intéresse uniquement à la mère et à son bien-être. Mais au moment de la naissance, le bébé passe au premier plan, laissant la jeune maman avec une sensation d’invisibilité souvent difficile à accepter. Cependant, la matrescence ne s’assimile pas pour autant à un baby-blues ou une dépression post-partum. Si les jeunes mères concernées se sentent totalement déboussolées, elles ne ressentent pas pour autant un rejet de leur bébé et de leur rôle plus généralement. Elles ont simplement beaucoup de mal à trouver leur place dans ce nouveau schéma qui leur demande beaucoup de nouvelles responsabilités. Les émotions sont également bouleversées et elles ont alors de vraies difficultés à savoir ce qu’elles veulent elles-mêmes.
Ces sentiments de dualité s’expliquent en vérité très simplement. En devenant mères, le cerveau des femmes change, comme ont pu le prouver plusieurs études scientifiques qui montrent que de nouvelles zones s’éveillent à ce moment précis de leur vie.
Malheureusement, la plupart des femmes qui vivent ce tsunami d’émotions ont la sensation d’être malades ou folles. Ce sont justement ces réflexions qui peuvent rendre la situation dangereuse pour leur santé mentale, car elles peuvent alors avoir la sensation de ne pas être « normales » et d’être de mauvaises mères. Il est donc nécessaire de faire connaître ce terme de matrescence pour permettre de faire déculpabiliser bien des femmes qui verront alors qu’elles ne sont pas seules et aussi qu’il s’agit d’une période qui finit par passer avec le temps.
C’est justement la mission de Clémentine Sarlat, journaliste, qui a elle-même connu cette phase si ambiguë. Pour démocratiser ce terme, elle a donc fait le choix de créer un podcast éponyme consacré uniquement à cette période. Une façon originale de toucher le plus de femmes possible afin de les déculpabiliser au mieux.